Un secret, ce n’est pas quelque chose qui ne se raconte pas. Mais c’est une chose qu’on se raconte à voix basse et séparément. (Marcel Pagnol)

La confidentialité est en effet l’art de ne révéler que l’information nécessaire, au bon moment, et à la bonne personne.

Lorsqu’il s’agit de transmission d’entreprise, la tradition du secret est bien ancrée dans les esprits, ce qui est renforcé, en Suisse, par la pratique culturelle.

La discrétion est certes nécessaire lors d’une transmission, puisqu’il s’agit de ne pas effrayer clients, fournisseurs et employés de l’entreprise. En outre, l’information de la mise en vente d’une entreprise peut être utilisée à mauvais escient par des tiers, considérant que cela met l’entreprise en situation de faiblesse. Toutefois, il va bien falloir exprimer aux potentiels candidats au rachat qu’une opportunité se présente.

Ce paradoxe spécifique à la transmission d’entreprise, renforcé en Suisse par l’aspect culturel du secret, conduit malheureusement parfois à la disparition de sociétés, faute d’avoir pu être transmises du simple fait qu’elles ne se sont pas véritablement mises sur le marché. Il y a donc une première « indiscrétion » pour le cédant, qui est de contacter des intermédiaires pour exposer son envie de remettre son affaire à court ou moyen terme.

Une fois que cette démarche a été entreprise, c’est le plus souvent aux professionnels de la transaction de gérer cette distillation de l’information en organisant un processus sur-mesure selon le scénario de cession d’entreprise. Ce processus commence néanmoins toujours par un « teaser » pour susciter l’attention des investisseurs potentiels : il s’agit de décrire sommairement la cible en mettant en avant ses principaux atouts sans en révéler le nom. Ceci permet de déceler l’intérêt d’un éventuel repreneur et d’ores et déjà découvrir les premières sensibilités relatives à la société cible. Une fois que le repreneur est mis à découvert, le cédant accepte, contre signature d’un accord de non-divulgation « Non disclosure agreement », la transmission d’un dossier  révélant l’identité de l’entreprise, et notamment ses produits et/ou ses services, son marché, son environnement, son organisation et ses informations financières (« mémorandum d’information »).

En général, des informations plus précises ne sont fournies au repreneur potentiel qu’une fois que celui-ci a indiqué, dans le cadre d’une lettre d’intention, quel est son projet pour la société et à quelle estimation de prix et quelles conditions, il serait prêt à acquérir l’entreprise.

Si le cédant accepte les principes indiqués dans cette lettre, il va autoriser le repreneur et ses conseils à accéder à tous les documents importants de l’entreprise, dans le cadre d’une « due diligence » afin de confirmer son souhait d’aller de l’avant. On a vu des cédants s’offenser, à ce stade, parce qu’on leur demandait une copie de leur bail à loyer, alors que le repreneur avait besoin des locaux pour assurer la continuité de l’exploitation !

Les nouvelles techniques de mise à disposition des informations « data rooms » permettent de procéder à une gestion rigoureuse de l’information, et de mettre à disposition les documents sans pour autant que ceux-ci ne puissent être copiés ou imprimés. Le cédant et ses conseils sont en mesure de voir quels documents sont consultés et par qui, ce qui leur laisse la maîtrise de ce qui est dévoilé.

L’importance de la transparence

Mais si la confidentialité est une évidence, et qu’elle doit être gérée tout au long des différentes étapes du processus d’échanges entre cédants et repreneurs potentiels, il est également important dans le cadre de ces transactions d’assurer une certaine transparence.

En effet, le repreneur va en tout état de cause « tout » savoir une fois qu’il aura acquis l’entreprise : il est inutile d’essayer de lui cacher des informations qui pourraient déclencher des conflits, ou des ajustements de prix, le cas échéant.

Ainsi la sauvegarde des intérêts de l’entreprise est un exercice d’équilibriste entre la protection et la transmission d’information. Le fait de se faire accompagner par des tiers spécialistes dans le cadre d’une cession d’entreprise peut aider à faire le tri dans ce qui doit rester confidentiel au fur et à mesure du processus de vente.

Murielle Madrona EB Advisory SA

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