“En quoi la gouvernance intéresse aussi les entreprises familiales” – PME Magazine

Déc 14, 2006

En quoi la gouvernance intéresse aussi les entreprises familiales

Télécharger la version PDF Edgar Brandt & Thomas Le Joubioux
Edgar Brandt Advisory SA

Risque fondamental: La transmission des sociétés laisse souvent les actionnaires avec des intérêts très divergents. Et ils n’hésitent plus à se manifester.

 

Quand on parle de Gouvernance d’entreprise, on pense immédiatement aux multinationales et aux entreprises publiques. Mais elle concerne tout autant les entreprises familiales. Dès lors, on peut s’interroger sur la définition de la Gouvernance d’entreprise selon ces différents acteurs économiques. Quelles sont les similitudes de la Gouvernance d’entreprise selon ces acteurs ? Il s’agit en fait de la protection légitime de l’actionnariat, en tant que détenteur du patrimoine de la société, de l’ensemble des parties prenantes, par la mise en place de structures de direction et de contrôle aptes à assumer cette mission et des processus associés. Les autres enjeux concernent la comptabilité, la vérification des comptes, la gestion des risques et la conformité avec les lois et les réglementations, mais aussi l’image professionnelle que l’entreprise donne à l’ensemble des parties concernées, à la communauté financière en particulier. La Gouvernance d’entreprise s’attache enfin à résoudre les intérêts divergents entre la direction et les parties prenantes, à prévenir donc les conflits d’intérêt et à assurer la continuité de l’entreprise. Ces buts sont aussi pertinents qu’il s’agisse d’une grande société cotée ou d’une entreprise familiale.

Pour les petites et moyennes entreprises, la Gouvernance d’Entreprise visera à organiser plus efficacement la structure au niveau de la direction et ses processus décisionnels. Plus concrètement, la Gouvernance d’entreprise pour les entreprises non cotées est riche parce que celles-ci présentent une grande diversité en terme d’activité, de taille et de structure d’entreprise. Dès lors, dans la mise en œuvre des règles de Gouvernance, il y a lieu de tenir compte tout particulièrement des points ci-après :

  1. La structure de l’actionnariat : les titres sont soit détenus par un seul et même actionnaire soit par plusieurs actionnaires, qui en général, appartiennent à la même famille. Pour les entreprises de taille moyenne, si le capital est plus dispersé, les actionnaires autrefois, passifs, se manifestent, l’entreprise doit alors répondre à ces nouvelles attentes.
  2. Le degré de développement de l’entreprise : pour les plus jeunes, il s’agira de renforcer avant tout la crédibilité à l’égard des banquiers et des bailleurs de fonds. Pour les entreprises plus matures, elles rechercheront en plus à renforcer leur crédibilité vis-à-vis des instances de régulation, des clients, des fournisseurs et des collaborateurs.
  3. Le souci de l’éthique : comment les dirigeants d’entreprise traduisent leur responsabilité sociale dans la stratégie d’entreprise.
  4. Le degré de contrôle de l’actionnaire majoritaire et le lien entre les propriétaires, le conseil d’administration et le management : si c’est la première génération, le propriétaire ou l’actionnaire sera actif au conseil d’administration et prendra aussi en charge le management de l’entreprise. Si c’est la deuxième génération, il y aura plusieurs propriétaires avec des intérêts divergents, certains assistant seulement aux assemblées générales ou siégeant juste au Conseil d’Administration, les plus impliqués s’occupant aussi du management.
  5. Le besoin en flexibilité : parce que les entreprises doivent être réactives, la Gouvernance d’entreprise doit s’ensuivre d’une mise en œuvre flexible et pragmatique.

Parmi les spécificités de la Gouvernance d’entreprise pour les entreprises non cotées, familiales en particulier, il est important d’expliciter la vision, de maîtriser et de délimiter le recours à des conseillers et aux contrôles externes. Ensuite, il sera tout aussi essentiel de déterminer les règles de nomination, d’évaluation et de rémunération du management. Afin de prévenir les revendications des actionnaires, on définira leur rôle et les modalités de leur intervention dans la gestion même de l’entreprise. Quant aux enjeux liés à la famille, la Gouvernance pourra consacrer la mise en place d’une plate-forme de communication, un forum familial mais aussi une charte familiale définissant des règles du jeu. La Gouvernance familiale traitera également de succession et de la résolution des conflits. Enfin, le cadre des relations avec les contreparties sera défini.

Concrètement, notre expérience récente a mis en lumière quelques thèmes majeurs. Les objectifs premiers des Présidents ou des Présidents et Directeur Généraux sont d’améliorer les règles et le fonctionnement du Conseil d’Administration, mais aussi le contrôle de la société. Ensuite, ils veulent souvent harmoniser les processus au sein des différentes entités du Groupe et rendre explicites les pratiques existantes, avec parfois l’idée de créer les conditions d’une croissance harmonieuse, en évitant les crises. Par ailleurs, la Gouvernance d’entreprise concerne d’autant plus les chefs d’entreprise que ceux-ci envisageaient leur retrait des affaires. Dans ce cas particulier, la Gouvernance d’entreprise apparut être une condition favorable à un départ progressif. En effet, le fondateur veut s’assurer qu’il garde un certain degré de contrôle sur la société, en tant qu’actionnaire majoritaire, afin d’encadrer et de surveiller le développement pérenne de sa société. L’autre facteur est que souvent le fondateur s’estime irremplaçable, comme un père de famille ne pouvant se résoudre à l’indépendance de sa progéniture, car il a été présent dans toutes les phases clefs du développement de la société. Des précautions préalables, par la mise en place d’une Gouvernance d’entreprise, l’aideront à organiser et préparer méticuleusement sa succession.

Globalement, nos mandats se sont concentrés sur les sujets suivants : expliquer la vision du président, développer en interne la déontologie, préciser les règles de Gouvernance d’entreprise, c’est-à-dire le fonctionnement de la haute direction, encadrer les engagements contractuels, garantir la conformité avec les lois et les règlementations, protéger les actifs du Groupe, spécifier les règles liées à la finance et au juridique.

Ces diverses expériences nous ont démontré une fois de plus que des modes de fonctionnement multiples au sein de la même entreprise l’exposent à des risques accrus, que faire converger les esprits vers la Gouvernance est long et que ce sujet peut vite passer au second plan des priorités. Enfin, le soutien continu du plus haut responsable de l’entreprise est primordial. Le sens de l’urgence est aussi indispensable pour mener à bien un tel projet.

Edgar Brandt & Thomas Le Joubioux

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